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Statut de l'animal : le citoyen pose ses Statut de l'animal : le citoyen pose ses exigences

La pression exercée par les associations de défense de la cause animale rencontre un écho croissant dans la société française.

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La France maltraiterait-elle ses animaux de rente ? « Non », disent les éleveurs mettant en avant les règles de bien-être qui s'appliquent aux élevages, leur amour de leur métier ou tout simplement le manque à gagner pour eux en cas de maltraitance. « A voir », répondent de plus en plus souvent les citadins interrogés. Les associations de défense de la cause animale, quant à elles, sont beaucoup plus virulentes : l'absence de statut juridique propre pour les animaux dans le code civil suffit à démontrer le retard de la France en matière de défense du droit des animaux. Elles réclament toujours un statut en dehors des biens dans le code civil. Car, dans celui-ci, il y a, d'un côté, les personnes et de l'autre, les biens dont les animaux appropriés. Il s'agit des animaux domestiques (élevage et de compagnie). Sont exclus les animaux sauvages non appropriés.

- « Les animaux ne sont pas des chaises », proclamait, il y a tout juste un an, une campagne de l'association « 30 millions d'amis » qui demandait qu'ils aient, enfin, un statut digne de leur condition. Leur campagne fera mouche et recueillera 700 000 signatures dont celles d'intellectuels en vue comme Luc Ferry ou encore Érik Orsenna. Pourtant, la France n'est pas vraiment en retard. Tout d'abord ces militants savent que le mot « meuble » en droit n'est pas synonyme de table ou de chaise, mais signifie simplement qu'ils peuvent se déplacer. Ensuite, le code rural et le code pénal portent déjà la marque de la considération apportée aux animaux. Le code rural, depuis 1976, précise que « tout animal est un être sensible ». Et le code pénal, dès 1994, protégeait l'animal contre son propriétaire « mal traitant ». Enfin, depuis le traité de Lisbonne de 2009, le droit communautaire a fait de l'animal « un être sensible ». Tout en rappelant que l'animal est une marchandise et que le but final est la construction d'un marché unique.

UN AMENDEMENT EN OCTOBRE

- Un amendement voté définitivement en octobre 2014, inscrit noir sur blanc dans le code civil français, cette fois, que « les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité ». Il précise, cependant, que « les animaux sont soumis au régime des biens corporels ». Ce nouvel article est sensé calmer les ardeurs des associations de défense des animaux. Il a été qualifié de symbole fort, par Jean Glavany à l'origine du texte, en direction du monde de l'élevage comme des associations de défense animale. En revanche, pour Geneviève Gaillard, autre députée, auteure d'une proposition de loi qui veut créer une place à part des biens aux animaux dans le code civil, ce n'est que « cosmétique pour empêcher des avancées plus décisives ».

- La polémique est prête à rejaillir : « c'est seulement une histoire de bobos parisiens », soutenait un jeune éleveur installé en bio dans le Loir-et-Cher. Un sentiment qui est loin d'être partagé par ceux qui assistent aux débats virulents qui s'organisent dans les médias ou dans les Hautes Assemblées. En février 2014, un colloque d'Ecolo-Ethik s'est tenu au Sénat. Il réclamait un statut à part entière pour l'animal et il a largement démontré que pour les tenants de la cause animale, l'élevage, en particulier celui de canards gras et l'élevage qualifié d'intensif, sont déjà dans le collimateur. En cette fin d'année, l'association L214 braque ses actions « coup de poing » sur le gavage des canards, entre photos peu ragoûtantes très largement diffusées sur les réseaux sociaux et reportages télévisés. Chez les plus convaincus des militants de la cause animale, c'est l'élevage même qui est en cause. Ils écoutent à peine les éleveurs au prétexte que l'on ne peut dire veiller au bien-être des animaux, voire prétendre les aimer, si ensuite on les tue pour les manger. Leur discours mêle également des propos anti-consommation de viande.

- Les producteurs réfléchissent à une meilleure communication sur leurs pratiques respectueuses des règles de bien-être édictées par l'Europe. La FNSEA a édité un document qui reprend secteur par secteur les cahiers des charges mis en place par les éleveurs. Ces derniers ouvrent leurs élevages à qui veut les visiter, parlent de leur amour des animaux, de l'intérêt y compris économique qu'ils ont à bien les traiter. Mais ce discours reste encore inaudible. La mort des animaux et, en particulier, les abattoirs, devient objet de controverse. D'autres polémiques surgissent : certains ne veulent plus de l'appellation « nuisibles » attribuées à certains animaux. Ou encore l'abattage de tous les animaux sauvages en cas d'épidémie (bouquetins atteints de brucellose, dans les Alpes) de plus en plus contesté.

CONTRAT DE DOMESTICATION

- L'amendement de Jean Glavany ne suffira pas à verrouiller le dossier. D'autant que les défenseurs de la cause animale sont des militants actifs. Le débat a diffusé dans la société et pousse à un statut protecteur de l'animal. Ce mouvement est mondial. Il y aura a minima une vigilance accrue de la société vis-à-vis des élevages. Reste à creuser l'idée émise par le philosophe Francis Wolff : face à « l'animalisme » qui se développe dans la société (c'est le pendant de l'humanisme version animaux), il faudrait que le monde de l'élevage se pose non pas la question du droit des animaux mais du devoir des hommes et des sociétés à leur égard. Il suggère de réactualiser le contrat de domestication qui lie l'homme et l'animal.

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